Mon père (très long texte)

Je n'aime pas mon père. Ma relation avec lui n'a jamais été réellement bonne, malgré mes efforts.
Quand j'étais petite, il ne s'est que très peu occupé de mon frère et moi. Il passait son temps devant son ordinateur, alors que ma mère faisait les tâches ménagères et se démènait pour nous élever. Le peu de contacts que j'ai eus avec lui durant cette époque se faisait seulement par le biais de l'argent. Il offrait des cadeaux à mon frère et moi, nous emmenait faire des sorties coûteuses...mais finalement, il n'a jamais endossé le rôle véritable d'un ''parent''. Il n'était pas là ''physiquement'' pour nous. Il ne nous adressait pas la parole, ne nous prêtait aucune attention, à part lors de ces courts moments, dont le nombre était très limité dans une année. Je ne le connaissais pas. Sa personne était comme une fantaisie, une mystère pour moi. Je le voyais tel un ''idole'' intouchable dont je ne savais rien. Je faisais tout pour qu'il me remarque et fasse attention à moi. J'aimais les mêmes choses que lui, je m'intéressais à ses passions...je parlais constamment de lui à l'école à mes camarades, en inventant parfois des histoires... Mais aucun de ses efforts ne m'a pourvu de l'attention que je désirais de sa part.
En grandissant, la figure que j'avais de lui s'est peu à peu brisé. Je suis passée d'un extrême à l'autre.
Mes parents ont divorcé lorsque j'avais dix ans. C'est mon père qui a quitté ma mère. Je l'ai associé à la ''destruction'' de notre famille. J'éprouvais beaucoup de rancoeur envers lui au début. Ma mère allait très mal et c'était de sa faute.
J'allais vivre chez mon père un week-end sur deux. Étrangement, c'était la première fois que je le voyais autant.
C'était très compliqué pour mon frère et moi. L'appartement dans laquelle nous habitions avec mon père était constamment sale, désordonné...Mon père ne savait pas ranger ses affaires. Enfant unique chouchouté par sa mère puis par la mienne, il est resté un adolescent.
J'ai alors en quelque sorte pris le rôle qu'avait pu avoir ma mère. Je rangeais tout, nettoyais chaque pièce, chaque placard...je me faisais engueuler par mon père qui ne supportait pas que je déplace ses affaires. Pourtant, je faisais simplement cela pour me sentir mieux dans cet environnement dégueulasse.
Je m'occupais de mon frère tout le temps...mon père faisait des siestes de deux heures tous les jours et était tout de même trop épuisé pour s'occuper de nous... Je jouais avec mon frère, lui lisais des histoires et je lui ai même appris à lire et à écrire. On s'ennuyait tellement, on ne sortait pas. Quand je tentais de raconter des histoires de mon quotidien au collège à mon père, il lui arrivait de simplement me dire qu'il ne souhaitait pas les entendre. ''Je n'ai pas envie de t'écouter, ça ne m'intéresse pas.'' Ça me faisait tellement de peine d'entendre ça, j'avais l'impression d'être une merde... Une fois, il m'a dit que j'étais une ''connasse'' et une ''salope''. J'avais onze ans, mais c'était apparemment ''pour mon bien'' : j'étais dans une mauvaise passe à ce moment-là. C'était le cas, mais peu importe ! Pourquoi se comporter ainsi vis à vis d'une enfant (qui vient d'ailleurs de vivre un divorce) qui ne recherche que l'amour d'un parent ? Je ne comprends pas.
Il me terrorisait. Pendant sa sieste, nous ne devions faire aucun bruit, sinon il débarquait et hurlait. Dès que mon frère de six ans se comportait ''mal'', il lui mettait des pichenettes dans le front. Si je prenais sa défense, il s'énervait contre moi. J'ai commencé à détester mon père. Je lui en voulais de faire ainsi du mal à mon frère, je m'en voulais de ne pas pouvoir conforter ce dernier assez efficacement... J'étais épuisé de devoir m'occuper autant de mon frère, comme si il était mon enfant.
En grandissant, j'ai aussi appris le traitement que mon père avait fait endurer à ma mère. Elle ne voulait pas augmenter la haine que j'avais à son égard, mais elle a laissé entrevoir quelques détails qui m'ont appris des choses dont je n'avais jusqu'alors pas idée. Il la rabaissait tout le temps, en lui disant qu'elle ne valait rien, qu'elle ne méritait pas son travail...il était irrespectueux envers elle et son entourage. En plus de lui en vouloir pour mon frère, je lui en voulais d'avoir fait du mal à ma mère... J'essayais de défendre tout le monde.
Avec les années, notre relation s'est plus dégradée qu'autre chose. Mon père s'est remis en question et excusé de ne pas avoir été présent pendant mon enfance. Il est parfois gentil mais ces moments ne durent jamais longtemps...Il finit toujours par crier ou péter un câble pour une moindre erreur de notre part. Mais il continue de m'humilier souvent. Il se joue de mes sentiments et me manipule. Il me fait constamment croire que la situation est causée par mon comportement... J'arrive à résister à tout cela et à passer outre, mais j'ai peur pour mon frère de neuf ans, qui n'est pas encore capable de se défendre comme moi...mon père le rabaisse et j'ai peur que ça l'affecte quand il grandira. Je n'arrive pas à être suffisamment là pour lui.
Je n'en peux plus. J'ai essayé de repartir à zéro, d'oublier ce qu'il m'a fait, mais ça n'a aucun effet. Il continue de me decevoir et de me rappeler qui il est vraiment en réitérant des comportements qu'il avait eus dans le passé. Rien que tout a l'heure, il m'a dit que j'étais une ''enclure'', une ''raclure de merde'', ''une sale égoïste'' (okay, ça c'est peut être vrai) parce que je ne lui ai pas fait de cadeaux pour la fête des pères. J'étais trop prise par mes révisions du brevet pour penser à ça... Le pire, c'est qu'il dit cela avec le sourire, en riant, en faisant passer ça pour un conseil normal. Normal ? La façon dont il le dit me fait littéralement sentir comme la pire des merdes. Je ne mérite pas de me faire traiter comme ça par lui.
Toujours des allusions de ce genre dans les conversations avec ses amis, toujours de l'humiliation gratuite...
Je le déteste. Je déteste quand il se fait passer pour un père idéal devant ses proches... Quand il fait ressentir sa prétendue supériorité à tout le monde autour de lui. Il se croit sur un podium, entouré de merdes, de ''cassos''. Je ne peux plus le supporter. Je me sens oppressée, mal à l'aise. Angoissée. Je redoute ces vacances dont je vais devoir passer une partie chez lui. Je suis obligée d'y aller. Je ne peux pas lui reprocher sa façon d'être car il n'est pas tout le temps comme ça. Il lui arrive d'être un père normal.
Mais je ne pourrais jamais l'appeler ''Papa''. Ce n'est pas un confident pour moi, c'est à peine si il sait ma date de naissance (lol).
Malgre de nombreux déménagements, son appart est toujours aussi dégueulasse et le ranger ne sert à rien. Le bordel réapparaît en à peine un jour...je me sens mal dans ce merdier putain.
Pourtant, ce n'est pas faute de lui en avoir parlé. Je lui ai raconté de nombreuses fois combien ses actions m'avaient affectées, sans succès. Sa gentillesse n'est que de passage et ne dure jamais.
Bref, j'ai vraiment du mal à l'apprécier.