Mon dernier poème, je pense

[je ne mettrais pas le nom], je te prierai de m’excuser — adieu,
Je pars, las du tumulte, en paix vers d’autres cieux ;
J’aurais voulu tenir, demeurer un peu mieux,
Mais l’ombre a tout couvert, je n’entrevois plus qu’yeux .

Je ne sais plus pourquoi vivre, ni pour qui,
Mon cœur est épuisé, mon âme est sans éclat ;
Chaque mot me détruit, chaque regard me hait,
Et le moindre silence en moi devient un cri.

Je n’ai plus la force, hélas, de tout sentir,
Qu’un simple mot m’abatte, qu’un geste m’anéantisse,
Qu’un regard soit tiré comme balle complice —
J’aurais tout essayé : parler, pleurer, sourire.

Les jours passent, semblables à des reflets ternis,
Je m’épuise à masquer l’éclat de ma misère ;
Certains diront sans doute : « Il fut trop faible, amer »,
Ils auront peut-être raison, oui, mes amis.

Certains diront : « La vie s’offrait encor à lui »,
Ils auront raison — mais je n’y vois qu’un mur,
Un mur infranchissable, un immense azur
Qui pèse sur mon cœur comme un ciel assombri.

Quatorze ans à souffrir, à douter, à me taire,
À jouer, à trembler, sans trouver la lumière ;
Et maintenant lassé de ce combat sévère,
Je cherche le repos, la douceur, la prière.

Je suis sincèrement désolé, [je ne mettrais pas le nom],
D’avoir pesé sur toi, d’avoir trop rit, pleurer ;
Pardon pour mes éclats, trop bruyants, trop sincères,
Et pour mes mots parfois trop prompts à blesser.

Avant de m’en aller, permets que je te dise
Merci pour ta bonté, pour tes yeux indulgents ;
Pour m’avoir écouté, trop souvent, patiemment —
Et pour avoir calmé mes tourments, mes bêtises.

Je te prierai de m’en excuser encor :
Si mon ombre t’a blessée, oublie-la, je t’en prie ;
Ne prends pas la peine de me répondre, amie —
Que ton rire demeure, que ton cœur soit plus fort.

Et vraiment, oublie-moi, poursuis ton horizon ;
Comme le disait l’artiste aux larmes souveraines :
« The show must go on », malgré nos vieilles peines —
Merci, [je ne mettrais pas le nom], et à jamais...