c'est le premier poème dont je suis un peu fièr

Le jour s’étire, lent, sur mes draps sans couleur,
Et mon âme s’endort dans un calme funèbre ;
Je cherche en vain la paix, mais je n’ai plus de cœur,
Le vide en moi s’installe et lentement m’enserre.

Mon frère est apparu, porteur d’un peu de jour,
Son rire a traversé ma brume solitaire ;
Le temps d’un plat tiédi, d’un fugace retour,
J’ai cru sentir la vie, légère et passagère.

Mais la brume revient, tenace et sans pardon,
Elle enlace mon front, m’enchaîne et me ramène ;
Je dérive sans bord, sans repère, sans nom,
Dans un gouffre muet où s’effacent mes peines.

Et quand tombe la nuit, complice du néant,
Mes démons prennent place à la clarté mourante ;
Je lutte contre moi, faible et vacillant,
Et même mon prénom devient chose absente.

Alors je mens encor, je dis que tout va bien,
Je souris à ma mère, éteignant ses alarmes ;
Je dis que j’ai dormi, que le sommeil me vient,
Mais mes nuits sont des mers noyées sous mes larmes.

Je ne veux pas mourir, je veux cesser d’avoir mal,
Sentir qu’un jour au moins s’efface ma détresse ;
Qu’un éclat de douceur brise enfin le cristal
Où mon cœur s’est figé dans une ombre sans cesse.

Je porte mille fautes au fond de mes remords,
Coupable d’exister, d’aimer, d’être et de taire ;
Je vois dans les regards le reflet de mes morts,
Et ma peine s’y perd comme au fond d’une mer.

Mon père dit souvent : « Je connais ma douleur. »
La mienne n’a ni nom, ni contour, ni rivage ;
Elle est ce lent poison qui s’insinue au cœur
Et dévore mes nuits d’un murmure sauvage.

Pourtant chaque matin, je m’arrache au néant,
Cherchant dans l’horizon un peu d’or, un repère ;
Peut-être qu’un soleil, patient et bienveillant,
Peindra sur mon brouillard la couleur de la terre.